LE TIFAIFAI OU L'ART DE LA PATIENCE

LE TIFAIFAI OU L'ART DE LA PATIENCE 
Le tifaifai c’est l’art du patchwork, adapté par les Polynésiennes. C’est l’art de la patience et 
de l’économie merveilleusement sublimé par des générations de femmes emplies de tendresse 
et de savoir-faire. Le tifaifai c'est tout le Pacifique cousu sur un tissu. 
Il s’appelle tivaivai à Hawaii, tivaevae aux îles Cook, tifaifai à Tahiti et il signifie « 
raccommoder ». Son origine est commune à toute l’Océanie : ce sont les femmes de 
missionnaires qui on enseigné la technique du patchwork aux peuples du Pacifique 
nouvellement christianisés. 
Au dix-huitième siècle, les missionnaires protestants accompagnés de leurs épouses vinrent 
évangéliser les îles du Pacifique. Les femmes emportaient dans leurs malles quantité de tissu, 
matière nouvelle en Polynésie où le tissage était inconnu, faute de plantes fournissant des 
fibres ou d’animaux à poils longs. Ces cotonnades devinrent des robes longues et austères 
tandis que les précieuses chutes furent appliquées avec passion sur de plus grandes pièces 
d’étoffe pour donner naissance aux tifaifai. 
Le tifaifai occupe aujourd’hui une place prépondérante dans la vie sociale et religieuse 
polynésienne. Il est l’incontournable objet de décoration intérieure et sa présence est 
essentielle pour les grandes occasions de la vie : naissance, mariage, décès. 
Les tifaifai peuvent mesurer trois mètres sur trois, demandent une grande précision et sont 
l’affaire d’un groupe de femmes. Certains tifaifai confectionnés pour d’importantes occasions 
comportent plusieurs milliers de minuscules pièces de tissu et demandent plusieurs mois de 
travail. 
Les Polynésiennes ont adopté le tifaifai dans leur quotidien. Tout comme elles pratiquaient en 
groupe, le battage du tapa, cette étoffe végétale tirée de l’écorce de certains arbres, elles 
conservèrent, avec l’élaboration des tifaifai, l’aspect convivial du travail réalisé en commun. 
Les motifs utilisés pour orner les tapas étaient souvent tirés du monde végétal. Il s’agissait de 
feuilles d’arbre à pain ou de fougères enduites de pigments et appliquées sur le tapa. 
La tradition a continuée et les motifs actuels des tifaifai reproduisent la luxuriance de la flore 
polynésienne. On y admire les fleurs d’hibiscus, de jasmin, de tiare, les ananas et toujours les 
fougères et les feuilles et fruits du mythique arbre à pain. La modernisation de l’art du tifaifai 
et le savoir-faire des artisanes ont permis d’ajouter de nouveaux motifs empruntés au tatouage 
ou à la vie marine. 
Les couleurs, elles aussi, ont changé. Plutôt sobres par le passé, elles évoluent de nos jours 
dans des gammes chatoyantes. Certaines fois elles deviennent même mode, voire « tendance » 
pour la plus grande joie des acheteurs ! 
Il existe principalement deux techniques de composition. Le tifaifai pu, où les motifs sont 
constitués de petits morceaux d’étoffe disposés comme une mosaïque et représentant des 
motifs géométriques comme des losanges, des étoiles, et le tifaifai pa’oti. Sur ce dernier, les 
motifs plus grands, représen¬tant des fleurs ou des fruits sont découpés de façon très 
symé¬trique et cousus « en applique » sur un large tissu. Le peintre Matisse s’inspira de ces tifaifai pa’oti qu’il avait admiré durant son séjour en Polynésie pour créer ses tableaux et ses 
décou¬pages aux grands aplats de couleur. 
De nos jours, cet artisanat élevé au rang d’art trouve sa place aux cimaises de galeries d’art 
néo-zélandaise ou hawaïennes ainsi que dans de nombreux musées de par le monde.